Caution : suis-je toujours tenu si, au moment de payer, la consistance de mon patrimoine a diminué ?
La caution trouve parfaitement son origine dans son étymologie, le latin cautio, « précaution », dérivé de cavere, « prendre garde ». À celui ou celle qui s’engage vis-à-vis d’un créancier à le payer si le débiteur s’avère défaillant à l’échéance (article 2011 du Code civil), il est en effet fortement conseillé de prendre garde.
Le cautionnement constitue la garantie la plus souvent réclamée par les banques et suscite un contentieux très important lors de sa mise en œuvre par les créanciers bénéficiaires car les cautions cherchent à échapper à leur engagement en soulevant de nombreuses contestations.
L’une d’elles est l’erreur sur les risques inhérents à son engagement. Mais la jurisprudence estime que cela ne sera pas suffisant (Cass. com., 10 octobre 1995, n°93-11.374) sauf si l’erreur porte sur un élément convenu entre les parties et érigé par la caution en condition essentielle, tel l’octroi ou le maintien d’un crédit, voire la solvabilité du débiteur.
Certes la banque a une obligation d’information à l’égard de la caution car lorsque le crédit accordé au débiteur principal présente pour ce dernier un risque d’endettement excessif à raison de ses capacités financières, la banque doit en informer la caution en la mettant en garde, sauf si cette caution peut être considérée comme une caution avertie.
Est considérée comme avertie la caution qui, à raison de ses compétences financières suffisantes, est clairement en mesure d’avoir seule conscience de la situation en fonction du montant garanti et de la complexité du montage financier objet du prêt garanti (Cass. com., 17 mai 2011, n° 10-14936).
La caution peut aussi invoquer la disproportion entre le patrimoine qu’elle avait au moment de son engagement et celui qu’elle présente lorsque le créancier vient la trouver pour lui demander d’honorer cet engagement. La caution pense souvent qu’il suffit que son patrimoine ne soit alors plus suffisant pour échapper à ce créancier soudainement apparu. C’est une erreur.
Lors de son engagement, la caution est protégée par le code de la consommation (Article L 341-4) qui décide qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionnée à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Mais récemment, la Cour de cassation a rappelé que la loi n’impose pas au créancier professionnel de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement. Elle a ajouté que c’est à la caution d’apporter la preuve, lorsqu’elle l’invoque, que son engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus (Cass. com., 13 septembre 2017, n° 15-20.294).
La caution doit ainsi établir la valeur et la consistance de son patrimoine (Cass. com. 22 février 2017 n°15-17739) ce qui suppose de conserver tant qu’elle peut être amenée à payer à la place du débiteur tous les documents datant du temps de la signature de son engagement relatifs à la composition de son patrimoine, et notamment ses avis d’imposition ou la fiche de renseignement remise à la banque créancière.
Lorsque la disproportion est établie, c’est à l’inverse à la banque de démontrer que le patrimoine de la caution lui permet néanmoins de faire face à son obligation au moment où elle est appelée à exécuter son engagement (Cass. 1e civ. 10 septembre 2014 n°12-28977).
Bien que prévu par le Code de la consommation, ce dispositif bénéficie au dirigeant qui s’est porté caution des dettes sociales dès lors qu’il est une personne physique (Cass. com. 22 juin 2010 n° 09-67.814).
Vincent Platel
Avocat au Barreau de Lille
Intervenant en Droit de la communication à l’ISTC
Secrétaire général de Place de la communication
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